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Sciences de la vie et de la Terre

Améliorer la mémorisation en seconde avec Anki

24 / 05 / 2016 | Anne PRIMEL

Améliorer l’apprentissage et donc les résultats et la motivation des élèves de seconde est un enjeu majeur en SVT au lycée. Améliorer la mémorisation des notions par l’utilisation de cartes numériques éditées grâce au logiciel Anki peut permettre une répétition des révisions et une approche différente. Cet article recense les essais avec une classe mettant en évidence les obstacles, les points positifs et les perspectives possibles de l’utilisation d’Anki en SVT.

Contexte

  • 5 semaines d’observation
  • Classe de seconde : 35 élèves - 1 séance de 1h30 par semaine en demi-groupe sans accompagnement personnalisé en SVT.
  • Niveau de la classe : hétérogène, 1/4 de la classe ne s’investit pas beaucoup dans son année de seconde.
  • THEME 1 : La Terre dans l’Univers, la vie et l’évolution du vivant : une planète habitée - L’ADN : un indice de la parenté des êtres vivants

Diagnostic

Les élèves ont été soumis à un questionnaire pour recueillir leurs avis, leurs besoins et leur motivation sur leurs apprentissages en SVT à l’issue d’un premier trimestre.

Résultats
Si l’on considère que les réponses sont sincères, les résultats du diagnostic font apparaître plusieurs points :

  • 2/3 des élèves reconnaissent restituer leurs connaissances de façon incomplète et pour 1/3, il s’agit d’un problème de mémorisation (l’autre tiers attribue ses difficultés à des problèmes de compréhension des questions et la moitié au contexte de la question).
  • 70 % des élèves répondent avoir révisé le cours 3 fois ou + avant évaluation.
  • la moitié des élèves seulement utilise la fiche de maîtrise des connaissances qui récapitule les questions de restitution auxquelles un élève doit savoir répondre (avec le bilan dans lequel on trouve la réponse : voir fichier joint). Seule la moitié des élèves l’utilise alors que les ¾ pensent que c’est très utile et 1 seul inutile !
  • 100% des élèves souhaitent progresser en SVT et la quasi-totalité aimerait améliorer sa mémorisation.

Conclusion
En classe de seconde, la mémorisation des notions n’est pas satisfaisante, expliquant pour une part les difficultés de restitution des connaissances dans des questions de vocabulaire ou de définitions précises. Si la fréquence des révisions est celle indiquée (ce qui m’étonne un peu quand même), les résultats devraient être meilleurs. 2 facteurs peuvent expliquer ces difficultés : la construction et la compréhension des notions ne sont pas solides et/ou les méthodes de révision ne sont pas suffisantes ou efficaces.
La fiche de maîtrise des connaissances a pour objectif de les aider à réviser mais une moitié ne l’utilise pas alors qu’ils la trouvent très utile ! Les élèves ont tous envie de progresser, de mieux mémoriser mais les outils pour les aider doivent être adaptés.
L’utilisation d’ANKI peut donc constituer une alternative à la révision du cours classique, aux fiches personnelles ou à la fiche de maîtrise des connaissances.

Démarche

1 - Introduction du logiciel
Après présentation du logiciel et de son intérêt, le professeur a proposé (et non imposé) l’outil Anki à la classe à l’issue des résultats du questionnaire.
Le lien pour le téléchargement d’Anki leur a été donné, quelques cartes d’essai leur ont été proposées en exemples et la préparation de 4 cartes chacun sur le chapitre leur a été demandée de façon obligatoire.
La semaine suivante, si tous les élèves ont préparé leurs cartes (sur feuille ou bien cartes bristol), seul 1/3 de la classe a téléchargé le logiciel. La préparation de leurs propres cartes leur a semblée ludique et donne des questions et réponses pertinentes. Peu avaient enregistré leurs cartes via le logiciel.
Le téléchargement et l’utilisation du logiciel sont volontairement laissés libres pour tester la réelle motivation des élèves pour l’outil.
Un questionnaire est de nouveau distribué pour évaluer les modalités d’utilisation ou pas d’Anki.

2 - Adhésion et freins à la première utilisation d’ANKI
Téléchargement du logiciel
Les élèves qui n’ont pas téléchargé le logiciel ont diverses raisons : oubli et /ou manque de motivation, absence de matériel informatique au domicile, mémoire insuffisante ou absence d’accès internet sur leur portable, marque de smartphone sur lequel l’appli est payante, élèves n’aimant pas travailler sur un support numérique…

Convivialité d’Anki
La quasi-totalité des élèves trouve que l’application est bien faite et facile à utiliser sans notice ou explications supplémentaires. La fabrication des cartes peut se faire « rapidement » en classe.

Utilité d’Anki par rapport aux fiches de révision personnelles ou proposées par le professeur
Beaucoup d’élèves sont habitués aux fiches de révision ou bien à la réalisation de leurs propres fiches. Il est donc difficile d’adopter une autre méthode en seulement quelques semaines.

Poursuite de l’utilisation d’Anki par les élèves
De nombreux élèves envisagent d’utiliser les paquets de cartes pour réviser le devoir commun ayant lieu 3 semaines après.

3 - Anki et résultats aux évaluations

Préparation de l’évaluation
Pour préparer le devoir commun sur le thème 1 en entier, les élèves avaient les fiches de maîtrise des connaissances (version papier) et des paquets de cartes Anki couvrant la totalité du programme mises à disposition sur Pronote pour les élèves : libre à eux le choix d’utiliser les uns ou les autres ou pas du tout comme d’habitude. Les cartes proposées permettent de se tester sur les définitions et/ou la maîtrise du vocabulaire attendu. Les cartes ne testent pas le transfert des connaissances ni la mise en relation de données ni l’étude de documents que l’on pourrait joindre aux questions.

Paquet de cartes "ADN seconde" (à ouvrir avec Anki)

Un questionnaire est donné en même temps que le devoir commun pour connaître les modalités de révision de chaque élève et la part éventuelle d’Anki dans leur apprentissage.
Si l’on considère que les réponses sont sincères, les résultats montrent que :

  • Les élèves ayant téléchargé l’application ne représentent encore que la moitié de la classe seulement.
  • 70 % des élèves ont quand même utilisé les cartes Anki au moins 1 fois (sur le support de quelqu’un d’autre ?) et près de la moitié des élèves les ont utilisées + de 3 fois.
  • La moitié des élèves ayant téléchargé l’application pense qu’ils mémorisent mieux avec Anki mais il demeure encore la moitié de la classe qui ne se prononce pas (ceux ayant téléchargé l’appli ou non) ou bien pense le contraire. C’est le même résultat environ pour leur avis sur l’aide à la réussite au contrôle.
  • Les raisons pour justifier leur réponse sont peu nombreuses ou pas en relation avec la question parfois.
  • La moitié des élèves préfère utiliser les fiches de révision papier mais 1/3 aime autant Anki que les fiches de révision papier.
  • Les fiches personnelles sont + appréciées qu’Anki par la moitié des élèves mais le reste des élèves n’a pas de fiches ou bien ne les trouve pas forcément mieux.
     Une grosse majorité souhaite continuer à utiliser Anki (près de 60%) et aimerait que d’autres professeurs les utilisent mais de nombreux élèves (70%) ne souhaitent pas pour autant créer leurs cartes eux-mêmes.

Conclusion
L’outil peut être bien fait, facile d’accès, utile pour une évaluation mais cela ne suffit pas pour remporter l’adhésion de tous. Les élèves n’ont pas été plus nombreux à l’utiliser pour leurs révisions d’une évaluation pourtant importante dans le trimestre. Ceux qui l’utilisent, répètent l’usage et le doublent parfois avec les fiches de révision papier. La question des progrès en mémorisation et en évaluation n’est pas évidente pour eux. Ils attendent de recevoir leurs résultats aux évaluations pour en juger.

Des progrès grâce à Anki ?
Pour les questions de vocabulaire et de QCM avec définitions, les progrès sont évidents pour ces mêmes élèves d’une évaluation à l’autre mais également par rapport aux élèves des années passées n’ayant pas utilisé Anki. Le nom des nucléotides de l’ADN est connu et mieux orthographié, la définition de la transgenèse est mieux maîtrisée, les noms des axes de polarité sont très bien connus etc…
En revanche, on observe que les notions peuvent être bien citées et complètes par la quasi-totalité des élèves, en revanche, le réinvestissement de la notion (qui implique un transfert des connaissances) n’est pas toujours là. Ex : le nom des axes de polarité est parfaitement connu mais il reste des élèves qui se trompent sur le positionnement de ces axes sur un animal… La transgenèse est très bien citée mais plusieurs élèves ne parviennent pas à retrouver l’espèce donneuse et l’espèce receveuse dans un texte relatant une transgenèse…
Dans les questions de synthèse des connaissances, le vocabulaire est mieux cité, les arguments sont listés mais cela reste incomplet et parfois hors-sujet pour de nombreux élèves.
Dans les exercices de pratique de raisonnement à partir de documents, on n’observe pas de progrès qui seraient liés à l’usage d’Anki de façon évidente.

Analyse

Inconvénients

  • Équipement numérique personnel obligatoire pour l’élève.
  • Téléchargement impossible sur les téléphones en cas d’absence d’internet, de mémoire insuffisante ou bien de marque de smartphone (appli payante alors)
  • Présentation un peu encyclopédique des notions à retenir.
  • Temps important pour la création de cartes évaluant la pratique du raisonnement scientifique.

Plus-value pédagogique

  • Application très bien faite et donc facile d’utilisation.
  • Téléchargement, accès, importation des cartes, fabrication des cartes et des paquets simples et assez rapides à réaliser par l’élève et/ou l’enseignant.
  • Outil de révision supplémentaire qui augmente et diversifie les révisions.
  • Progrès évidents dans la maîtrise du vocabulaire
  • Utilisable pour tester et/ou réactiver les acquis des classes antérieures.
  • Grande variété de présentation et de paramétrage possibles.
  • Utilisable pour toutes les matières.

Conclusion

Anki est un outil bien fait, facile d’utilisation pour l’élève et l’enseignant et qui ne demande pas beaucoup de temps pour être mis en place sur des supports variés (PC, tablette, certains smartphones). Il permet de doubler les outils pour réviser, de répéter les révisions plus facilement, de mémoriser mieux les mots de vocabulaire et les définitions. Les progrès sur la maîtrise du vocabulaire sont évidents lors des évaluations.
Cependant, il reste certains écueils techniques liés à l’équipement numérique de l’élève, au modèle de smartphone et à la mémoire nécessaire pour l’installer.
D’autres écueils didactiques existent : par leur présentation, les cartes ont plus tendance à mettre l’accent sur la mémorisation de vocabulaire seulement laissant paraître notre matière comme une encyclopédie à ingurgiter ou un concours des « incollables » (jeu de cartes papier) sans tenir compte du raisonnement et de la manipulation des concepts que nous souhaitons développer chez nos élèves.
La pratique du raisonnement scientifique est possible via Anki en utilisant des documents (voire même des vidéos, des audios) que l’on peut insérer dans les cartes. Il s’agit d’un tout autre niveau de questionnement qui permettrait alors de se rapprocher de la totalité des compétences évaluées chez un élève. La construction de ces cartes constitue cependant un temps important pour l’élève et / ou l’enseignant.
Enfin, les 2 questionnaires soulignent que l’efficacité d’un outil dépend aussi de la motivation de l’élève à se l’approprier. Il n’est pas envisageable de l’imposer et d’attendre un enthousiasme immédiat. Anki, les fiches de révision papier, les fiches personnelles…sont autant d’outils à la disposition de l’élève selon sa volonté mais ne remportent pas l’adhésion de tous forcément en fonction de leurs motivations, de leurs préférences (papier/numérique), de leurs habitudes, de leur rapport à l’école…L’intérêt ici réside dans l’augmentation du nombre de révisions des notions quel que soit l’outil utilisé sur 5 semaines.
Restent les progrès lors de l’évaluation qui vont peut-être valoriser les efforts et les essais d’Anki chez certains et induire une spirale positive pour l’élève et ceux qui se montraient réticents au départ. Il faudrait également évaluer les bénéfices d’une année sur l’autre en testant la mémorisation à plus long terme ou bien en réactivant les acquis plus rapidement par ces questionnaires donnés en début de chapitre dans les classes supérieures (ex début phénotypes en 1ère S).

A suivre !